Facture électronique : les experts-comptables moteurs de la digitalisation

En France, d’ici 2024, la facture électronique va devenir obligatoire. Plus précisément, cela va concerner la collecte puis, en fonction de la taille de l’entreprise, l’émission des factures. Ainsi, cette nouvelle mesure va bousculer le fonctionnement des entreprises comme les TPE/PME, car elles utilisent souvent des processus manuels pour gérer leur facturation et leur trésorerie. De ce fait, les cabinets d’expertise comptable vont aussi être impactés. Afin de permettre aux cabinets le meilleur accompagnement de leurs clients, un atelier sur le sujet est revenu à l’ordre du jour du 77e congrès de l’Ordre des experts-comptables. 

Mais qu’est-ce que la facture électronique ?

Le cadre réglementaire français

En droit français, une facture électronique se définit comme toute facture créée, émise, reçue et archivée par voie électronique quelle qu’elle soit.

Ainsi, l’administration fiscale reconnaît trois types de factures (CGI, Article 289) :

  • les factures ÉDI (échange de données informatisées). Il s’agit de factures structurées, conformes à un accord entre les parties (CGI, Article 289-VII-3) ;
  • les factures signées, de formes hybrides ou mixtes. Ces factures comportent un document PDF auquel est lié un fichier avec les informations essentielles sous forme structurée (CGI, Article 289-VII-2) ;
  • les factures papier et autres factures non structurées. En l’absence de recours à l’une des deux autres catégories de factures mentionnées, et pour lesquelles une piste d’audit fiable (PAF) est requise (CGI, art. 289 -VII-1).

Des normes concernant le développement de la facture électronique

Concrètement, en fonction du type de facture utilisé, une norme doit garantir l’authenticité de l’émetteur, l’intégrité du contenu et la lisibilité du document pendant toute sa durée de conservation.

Par conséquent :

  • pour les factures ÉDI, la norme européenne CEN EN16931 a été choisie ;
  • pour les factures signées, la norme franco-allemande Factur-X peut être utilisée.

PME et TPE, quelles sont les possibilités ?

Le Conseil National de l’Ordre des Experts-Comptables (CNOEC) préconise l’utilisation de la facture au format mixte « Factur-x ».

Ainsi, le fichier, qui doit être électroniquement scellé pour être exonéré du PAF, est composé de deux parties :

  • une enveloppe PDF, lisible et compréhensible par un opérateur humain, avec signature ;
  • une enveloppe possédant un schéma XML. Elle doit contenir les données de la facture sous forme structurée.

En effet, elle est plus facile à mettre en œuvre que la facture ÉDI et moins complexe que la facture non structurée, c’est la norme la plus appropriée pour un traitement automatisé des factures de TPE/PME. Dans les faits :

  • Elle est exploitable par tout ordinateur (fichier PDF au format A3) ;
  • Elle rend possible la gestion automatisée d’un fichier XML ;
  • Elle est déjà validée par le portail de facturation du secteur public Chorus Pro et le sera bientôt par la DGFiP.

Généralisation de la facture électronique en France

La facturation électronique est amenée à devenir obligatoire pour l’ensemble des transactions domestiques soumises à la TVA entre entités du secteur privé (ordonnance 2021-1190 du 15 septembre 2021).

Un calendrier échelonné

Plus précisément, à compter du 1er juillet 2024, toutes les entreprises seront tenues d’accepter les factures électroniques. L’émission de factures sous forme électronique sera obligatoire à compter du 1er juillet 2024 pour les grandes entreprises, du 1er janvier 2025 pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et du 1er janvier 2026 pour les petites et moyennes entreprises (TPE/PME).

Cohabitation des deux dispositifs

En complément de la facturation électronique, également appelée « E-invoicing », un système de « E-reporting » est prévu.

D’une part, le système « E-invoicing » :

  • a pour objet les transactions B2B en France ;
  • oblige un double flux à destination du client et de l’administration fiscale ;
  • a une fréquence de flux à la facture.

Par ailleurs, le système « E-reporting », pour sa part :

  • concerne les transactions internationales B2B et B2C avec facture, les acquisitions intracommunautaires et les flux de paiement ou d’encaissement ;
  • fait subir un flux unique à l’administration fiscale (sans transmission parallèle à l’acheteur) ;
  • présente une fréquence de flux mensuelle (à préciser).

Développement d’un nouvel écosystème

Par conséquent, la facture électronique se trouvera au centre d’un nouvel environnement qui comprendra :

  • des logiciels de facturation ;
  • des applications de scellement de factures ;
  • des plateformes de facturation, d’extraction de données et de distribution (plateformes de numérisation des partenaires/PDP) ;
  • des applicatifs de comptabilisation ;
  • des applicatifs de services (archivage, paiement…).

Quelles vont être les nouvelles prérogatives de l’expert-comptable ?

Grâce à l’adoption généralisée de la facture électronique, un « nouveau monde de services administratifs et comptables » s’offre aux cabinets. En effet, l’utilisation des données de facturation permet de créer et de fournir de nouveaux services intéressants pour les clients.

Processus de migration

Comme vu précédemment, la date du 1er juillet 2024 s’applique à toutes les entités pour la réception des factures électroniques. Il appartient désormais à l’expert-comptable, interlocuteur privilégié du chef d’entreprise de PME/TPE, de “tirer son épingle du jeu” en élaborant une stratégie pour planifier avec ses clients la mise en œuvre de la facturation électronique. De ce fait, il pourra dès l’année prochaine présenter ses offres d’accompagnement et faire signer les mandats et lettres de mission correspondants.

Établir des factures électroniques

L’expert-comptable se base sur la facture ou le “brouillon” de facture réalisé par le logiciel du client. Il récupère la facture au format « Factur-x » ou crée un fichier « Factur-x » et le scelle pour générer la facture électronique, puis archive cette dernière.

Offrir des missions liées à la facture électronique

En effet, depuis l’adoption de la loi PACTE, l’expert-comptable peut proposer de nouveaux services à ses clients, dont :

  • l’assistance au paiement des dettes fournisseurs avec des échéances fixes pour l’entreprise ;
  • l’assistance à l’encaissement des dettes clients, les cessions de dettes, l’affacturage et recouvrement amiable ;
  • le suivi et l’optimisation de la trésorerie par un accompagnement dans la gestion des règlements des factures électroniques.

Pour conclure, la transition vers la facturation électronique est un enjeu majeur dans le développement futur des cabinets. Ce sujet sera d’ailleurs au centre des discussions du 78e Congrès, qui se tiendra à Montpellier les 27, 28 et 29 septembre 2023.

L’Équipe Groupe Novances